Tout simplement Noir - Jean-Pascal Zadi

En partenariat avec le Musée National de l’Histoire de l’Immigration et le groupe de recherche ACHAC, Cinéma pour Tous a récemment lancé « NOS HISTOIRES DE FRANCE », un cycle de films contre le racisme destiné aux classes de collèges et lycées réparties sur toute la France. 

Pour le lancement de ce cycle, nous avons choisi de traiter le thème des « représentations et discrimations » avec le film Tout simplement noir de Jean-Pascal Zadi et John Wax. 

Même si le film est encore à l’affiche, le distributeur Gaumont a accepté de le diffuser au sein de 10 classes de région parisienne (258 élèves) allant de la 3èmeà la Terminale : 
– Léonard de Vinci à Guigneville-sur-Essonne                – Armand Carrel, Paris 19ème
– Langevin Wallon à Champigny-sur-Marne                    – Chantereine à Sarcelles                      
– Pierre-Gilles de Gennes à Paris 13ème                           – Marie Curie aux Lilas
– Henri Matisse à Garge-lès-gonesse                              – Jean-Jacques Rousseau à Sarcelles

Afin de préparer la séance ou de la poursuivre, nous avons mis des ressources pédagogiques à disposition des professeurs : en l’occurrence, des extraits de Frantz Fanon et d’Aimé Césaire, un article de Libération sur la représentation des Noirs en France et le communiqué de presse du film.

Grâce à notre collaboration avec la plateforme de la 25èmeheure, nous avons permis à chaque professeur inscrit de projeter le film directement dans sa classe, puis de participer au e-débat avec Jean-Pascal Zadi en posant leurs questions en direct via le Tchat.     
Isabelle Giordano retranscrivait les questions des élèves au réalisateur. 

Isabelle Giordano a ouvert le débat avec la question d’un élève du collège Marie Curie aux Lilas : 
« Qu’est-ce qu’il y a de vécu dans ce film ? »

Jean-Pascal Zadi Il y a un petit peu de vrai partout, le fait que dans le film je sois un acteur qui n’a pas de rôle et que lorsqu’il se présente à des castings, il se retrouve face à des rôles clichés… Beaucoup de comédiens noirs sont face à ce problème là, souvent ils se retrouvent face à des réalisateurs blancs et dans leur imaginaire, souvent il n’y a pas de place pour le/la comédien.e noir.e, donc souvent c’est des rôles clichés qu’on nous donne. Ca c’est réel de ne pas avoir assez de casting, ni de boulot. Enfin ça c’est avant la sortie du film parce que là maintenant tu t’imagines que c’est Las Vegas pour moi ! (rires) 
Mais je pense qu’on va arriver à dépasser cette difficulté quand des gens issus d’horizons divers réaliseront leur film et proposeront des rôles loin des clichés.

Question de Kessyah du lycée Pierre-Gilles de Gènes à Paris 13ème : 
« Est-ce que le t-shirt avec le visage Patrice Lumumba porté par JP est un clin d’oeil à l’indépendance de la RDC ?

JPZ : Ils ont l’œil ! (rires) Patrice Lumumba fait partie des héros de l’histoire africaine et même de l’histoire mondiale. Moi en tant que jeune français d’origine africaine, il y a plein de personnages héroïques que j’aurais aimé connaître mais qu’on m’a pas appris à l’école et toute cette recherche que j’ai fait en solo sur l’histoire de l’Afrique, sur la colonisation m’a amenée à découvrir plein de héros comme Thomas Sankara, Cheikh Anta Diop, Frantz Fanon,…  C’est une manière pour moi de lui rendre hommage parce que je trouve qu’en France, dans les manuels d’histoire il y a quelques lacunes.. Ca bouge en ce moment grâce à des documentaires comme Décolonisationspassé sur France 2 qui retrace toutes les histoires de colonisation. Ca fait partie des choses que j’aimerais faire avancer, essayer de parler un peu plus de ces histoires, qui ne concernent pas que les pays en Afrique mais aussi l’histoire de la France.

Question de Sacha du Lycée Rousseau à Sarcelles :
« L’humour est-elle une arme contre le racisme ? »

JPZ : Je pense même que l’humour est fait pour ça ! C’est encore mieux quand l’humour peut faire bouger les lignes. En tout cas l’humour que je pratique c’est dans cette optique là que je le fais, pour essayer de faire réfléchir et faire avancer les choses. Parfois c’est peut être râté, parfois réussi. En tout cas moi j’aime la France, j’aime mon pays et si avec mon travail je peux combler ces lacunes, tant mieux ! L’humour pour moi permet de fédérer, de rire ensemble, il y a quelque chose de cathartique dans le rire – je sais pas si vous allez comprendre ce mot ? (rires) Je me rappelle quand j’étais petit, mes parents étaient très occupés, j’avais 9 frères et soeurs mais on se voyait peu. Mais le dimanche soir, on mettait tous ensemble un film avec Louis de Funès par exemple et on se marrait, c’est un des rares moments où on était tous ensemble vraiment. J’aime le côté « on pense plus à rien, on rigole ». Par contre faut pas le reproduire à l’école, à l’école on est là pour travailler, par pour rigoler !

Question de Justine du collège Chantereine à Sarcelles : 
« Pourquoi tu exclus les femmes, les arabes, les juifs ? »

JPZ : La comédie c’est partir d’un point A pour arriver à un point B. Nous, à l’écriture ça nous faisait rire de prendre un personnage anti-raciste alors que lui même exclue tout le monde sauf les noirs… Il est carrément mysogyne ! Ca nous faisait rire, après je sais pas si c’est drôle ! (rires)
Mais à la fin, quand il va à la rencontre afroféministe, il se rend compte que c’est stupide de ne pas inclure des femmes noirs et lors de l’émission, il est mis face à ses contradictions. Au final, il y a des blancs, des noirs, des femmes, tout le monde. 
Si mon personnage était déjà très ouvert au début, il n’y aurait pas eu d’évolution. Au cinéma c’est ça qui est intéressant, l’évolution des personnages.

Question de Mohammed du Collège Matisse à Garge-lès-Gonesse : 
« Quel est le message du film ? »

JPZ : Etre noir, être blanc ne veut rien dire, ce sont des constructions. Le fait d’être noir n’est pas forcément une identité. Beaucoup ont la peau noire mais n’ont pas forcément quelque chose en commun. (…) Le film raconte qu’on est perçu comme noir mais qu’on ne se ressent pas spécialement comme tel. On sait qu’on est noir dans le regard de l’autre. Mais nous, personnellement, on se lève le matin, on est comme n’importe quel être humain. D’une manière assez humoristique, on a essayé de déconstruire tout ça dans le film. Ce qui compte c’est l’humanité des gens, chacun a sa singularité : être noir, être blanc, jaune, rouge… Au final ça veut presque rien dire. Ce qui compte c’est l’humanisme. 

Durant ces 40minutes d’échanges, Jean-Pascal Zadi s’est exprimé avec authenticité et a encouragé les jeunes à être le changement qu’ils veulent voir dans la société et à devenir ce qu’ils ont envie d’être, sans se mettre de limites ! Malgré les enjeux techniques, cette séance s’est déroulée sans accroc et les élèves ont tous applaudi le réalisateur, derrière leurs écrans.

Les professeurs ont déjà hâte d’être au prochain rendez-vous, qui se tiendra le jeudi 17 décembre avec un film sur la thématique de la guerre. 

TÉMOIGNAGES DE PROFESSEURS

« Merci encore pour cette super initiative et bravo pour la logistique ! »
JM Fleury, professeur de philosophie au lycéeLangevin Wallon de Champigny sur Marne

« Les conversations étaient riches et la séance a plu! Merci pour l’organisation! »
A. Dupont, Collège Chantereine de Sarcelles

« Le format est très réussi et les élèves ont applaudi à la fin de la séance
Nous sommes ravis de participer et nous serons présents à la prochaine séance ! »
A. Dufils, professeure-documentaliste au lycée Rousseau de Sarcelles

« Les élèves et l’équipe pédagogique ont beaucoup apprécié et vous remercient. »
N. Baruch, CPE du Lycée Armand Carrel à Paris 19ème

« Merci encore pour cette belle initiative de cycle ! »
J. Alahyane, professeure d’espagnol au collège Marie Curie aux Lilas

Les livrets d'accompagnement ne sont pas réalisés dans le cadre des projections virtuelles.